Sandie !
Il faut que je me gare maintenant.
-Sympa la voiture épave !
-Quoi, quelle voiture ? La mienne ?
-Non, la tienne, elle est juste crade, mais c'est normale. J'parlais plutôt de celle qui a plus de roues, qui a les vitres pétées et qui devait être blanche... avant.
-Ah, celle-là ? Ouais. Sympa.
-Combien déjà la location d'une place de parking ?
-133 euros par mois.
-Ouais. Sympa.
Ah, ben, j'y suis arrivé sans trop galérer.
Je sors. Lui aussi.
-Et maintenant ?
-Ben, on fait comme on a dit !
-J'appelle Sébastien, d'accord, mais après ?
-Ben, 'chais pas moi, tu laisses tes affaires ici, et on y va !
-Ok.
-Wouokey monkey ?
Alors... Sébastien... oui, ''Belgarath'' sur mon répertoire.
Ca sonne.
-Ca sonne ?
-Ouais, taisez vous.
-Y'a que toi qui peut m'entendre !
-Ouais, ben ça me gave déjà assez comme ça !
Répondeur.
-Merde, il répond pas.
-Il doit être en train de conduire.
-Je vais réessayer.
Ca sonne.
-Ca sonne ?
-Ben oui !
-'chais pas, ça aurait pu changer...
Il décroche !
-Sébastien ?
-Ouais !
-Ah ! T'es en train de conduire ?
-J'arrive, t'en fais pas, je suis parti un peu tard, mais ça ira.
-Euh, ben, euh, justement...
-Quoi ?
-Je risque d'avoir un peu plus qu'un peu de retard...
-Tu pouvais pas mieux le formuler.
-Comment ça ?
-Euh... c'est assez compliqué. Mais t'en fais pas hein ! Je serais là pour le tournoi, hein !
-Mais... tu es chez toi quand ?
-Bonne question !
-T'attends pas à ce que j'te donne une bonne réponse !
-Mais merde, vous avez pas une idée là ?
-J'en sais rien !
-Etienne ?
-Rha ! Mais trou du cul !
-T'avais qu'à y penser !
-Ouais ben, vous aussi hein !
-Etienne ? Ca capte plus ?
-Si, si ! Euh, bon, j'dirais qu'aux maximum, grand max hein, je suis parti pour minuit !
-Ah ouais... mais alors, je fais quoi moi ?
-Rentres chez moi, y'a un pot devant la porte, ma mère y range toujours les clefs ! Installe toi, tout nickel, repose toi, commande toi une pizza, j'te rembourserai !
-Non, mais pas la peine...
-T'es quand même incroyable ! A Camille, tu lui proposes à boire, à Sébastien, tu lui refiles une pizza, et moi ? Ketchi ! Tout ça, sous prétexte que ''je-suis-mort''.
-J'suis vraiment désolé l'ami, vraiment !
-Bah, c'est pas grave, ça arrive.
-Un peu spécial ton ami, il te demande même pas qu'est-ce qui te retient ?
-Vous voudriez peut-être que je lui dise que c'est celui qui a commandé l'opéra Garnier ?
-Quoi ?
-Ben, il fait de l'histoire de l'art...
-Non, mais sérieux, tu pourrais pas plus tôt lui dire que c'est Napoléon III, merde ! ''Né à Paris le 8 avril 1808, fils de...''
-J'vais pas lui dire !
-Ah... euh, oui. Fais ça. Fais pas ça plutôt. 'fin, tu m'as compris.
-Eh ?! Etienne ?
-Euh, oui pardon ! Désolé, c'est le bordel ici !
-Qu'est-ce qui se passe ?
-Ah, enfin !
-Mais bordel, qu'est-ce que ça peut vous faire ?
-Il est sans aucun doute le descendant d'un de mes sujets !
-Vous êtes vraiment, mais vraiment !
-Rien de particulier...
-Quoi ?
-Euh... si ! Si, mais c'est très compliqué, tu vois là, j'te raconterai... une vraie galère !
-Camille ?
-Quoi Camille ?
-Quoi Camille ?
-Ben oui, c'est elle qui fait appel à toi ?
-Mais pas du tout !
-Mais pas du tout !
-Ah, ben, alors, qu'est-ce qui se passe ?
-...
-... ?
-Etienne ?
-Oui euh... j'dois aider un ami !
-Oui euh... j'dois aider un ami !
-Non mais vous avez pas bientôt fini de me faire chier pendant que je téléphone ?
-''Bonsoir, est-ce que je téléphone sur un téléphone ?''
-Bah, c'est pas grave. Tu veux pas me dire. M'enfin, t'aurais pu prévoir ton coup quand même.
-Mais... Sébastien !
-C'est bon, on se voit demain ! Et merdi pour la piaule !
-La piaule en question date de 1863 ! Rha, le saligaud !
-Encore désolé Séb', je...
Clic.
-Oh mais vous ! Vous !
-Mouallez, c'était marrant !
-Super ! Ca vous éclate ?
-Pas qu'un peu !
-J'crois que j'vais m'en retourner à ma voiture finalement...
-Eh, pas maintenant que tu viens d'envoyer ce pauvre Sébastien dans la ''piaule'' !
-Bon, et on fait quoi alors ?
-Je sais où on va aller ! J'connais un bon bar !
-Dans un bar ?
-Ben ouais, j'allais pas t'amener à l'opéra quand même !
-Garnier ?
-Comme le shampoing ?
-Ouais, voilà, comme le shampoing. Bon, j'vous suis. J'y vais comme ça ?
-Hmmm... chemise blanche, manteau long noir, jeans'... Wouokey monkey !
-Vous avez fini de me piquer mes expressions ?
-Tu me fais pensé à ''Archie'' dans ''Rock'n rolla'' !
-Mais comment vous pouvez connaître ?
-''Disons que j'ai mes entrées dans cette ville en plein boom''.
-J'en ai marre. Sérieux, vous êtes quelqu'un de très dérangé !
-Tant que je dérange pas !
-Ouais ben, ça va pas mal aussi de ce côté là... Bon, donc, ça va, ''je conviens'' ?
-Ouaiiiiis ! T'inquiètes la belette !
-Oh putain...
On sort du parking.
Rue Mage, 21h27.
C'est par où ?
-'suis moi, t'en fais pas.
Vous m'envoyez pas dans l'un de vos bars à pecnauds ectoplasmiques, hein ?
-Ah, avec un peu de chance, on pourrait en croiser quelques uns...
Comment ça ?
-Ben, t'as déjà croisé Franzy et Charlie.
Mais y'en a encore ?
-J'crois que Saint-Arnaud avait dit qu'il viendrait voir son arrière, arrière, arrière, arrière, arrière... arrière petite fille.
Saint-Arnaud ?
-Ouais, mon pote Armand !
Mais c'est Halloween ou quoi ?
-Pas plus que d'habitude.
Vous voulez dire que vous faîtes ça... tout le temps ?
-Ouais, mais ça se voit pas.
Alors pourquoi, moi, j'les vois ?
-Parce que t'en as déjà vu.
Hein ?
-Ben ouais, si tu m'as vu, tu peux bien en voir d'autres, c'est normal !
Ok, mais pourquoi pas les autres types comme moi ?
-Eh, mais t'es unique ! Viens, on passe par la rue Ozenne.
Unique ?
-Ben, t'en connais beaucoup des types qui sont nés le 12 novembre 1990 ?
Mais... bordel ! Vous le faîtes exprès, hein ?
-De quoi ?
Pourquoi y'a que moi qui peut vous voir ?
-Je veux mon n'veu !
Mais non de non de non !
-Ben quoi ?
Pourquoi ''moi'' ?
-Parce que je le veux, c'est ce que j't'ai dit ! Rha !
Ah. Forfait impérial ?
-Non, rien à voir.
Pardonnez moi, j'ai pas pris le temps d'étudier la question des forfaits que l'on achète auprès de la Faucheuse.
-Ouais, alors, déjà, saches qu'elle n'a pas de faux, elle a un faisceau !
Un quoi ?
-Comme les licteurs !
Ah, vous m'en direz tant. Donc, si c'est pas dû au forfait impérial, c'est dû à quoi ?
-Joli le château du Crédit Agricole ! Hmmm... ? Ah ouais, ça, c'est un truc qu'on a dés qu'on meurt.
Mais j'comprends pas, j'pensais que tout le monde ne pouvait pas venir ici... à quoi ça servirait de ne pas être vu ou d'être vu des mortels si on ne peut pas aller chez eux ?
-Tu te poses trop de questions !
J'ai déjà entendu ça quelque part...
-T'es le genre de type à qui on a envie de le dire aussi.
Et vous, vous savez ce qu'on a envie de vous dire ?
Une femme passe à côté de nous.
Napoléon III se retourne.
-Hey ! Mais ça s'rait pas... ?
-'poléon ?
-Sandie !
C'est George Sand.
Robe spectrale à crinolines, ce même teint bleutée, rien d'étonnant...
-Ah ? Louis-Napoléon, ça par exemple ! Vieux renard !
-Qu'est-ce que tu fous ici, l'amie ?
-Bah, j'me traîne, j'me traîne... Et qui est-ce ?
-J'te présente Etienne, un ami à moi.
-Attendez, attendez, j'ai pas dit que j'étais votre ami.
-Eh bien... enchanté Etienne ! Je me présente, George Sand !
-Je vous connais, ne vous en faîtes pas. Amantine Lupin.
-Respectez mon nom de scène, monsieur...
-Ah, faut tout t'appendre hein !
-Ca va, ca va, je voulais juste dire que je vous connaissais...
-Ben, tu l'avais déjà dit.
-Bien, que faîtes vous ici ?
-Je comptais l'amener boire un verre.
-Je ne te savais porter sur... les mortels... masculins...
-Rha, tout de suite ! Non mais franchement, Sandie !
-Et vous ?
-Plaît-il ?
-Eh bien que faîtes vous ?
-Je constate que tu commences à t'habituer à nous parler ! C'est bien !
-En même temps, avec vous, Baudelaire et Franz-Joseff...
-François-Joseph ? Vous l'avez vu ?
-Celui-là même !
-Vous savez où il est allé ?
-Ah, non...
-Je saurais pas te dire.
-Arf, il m'a piqué mon cochon d'inde !
… !
-Bien, je crois que je vais m'en retourner à ce que je faisais.
-C'est à dire, à part vous ''traîner'' ?
-Alexis m'attend au Grand Rond.
-'lexis !
-Alexis ?
-Alexis de Tocqueville bien sûr !
-Ca m'aurait étonné.
-Un petit rendez-vous alors ? Rrrrr !
-'poléon, ce que t'es has-been !
-Mais ce que monsieur de Tocqueville travaille beaucoup ces derniers temps !
-Et sur quoi ?
-Un bouquin, je sais plus lequel...
-Quoi, on écrit encore quand on est mort ?
-Je crois que tu as encore beaucoup à lui apprendre, hein...
-Sans aucun doute ! Et sinon, sur quoi porte désormais son génie ?
-Ouais, 'vite fait son génie... ''La démocratie en gnagnagna'' hein...
-Je ne peux pas trop vous en dire plus, mais sachez qu'il m'a pris comme critique !
-C'est plutôt un luxe pour lui de vous avoir ainsi !
-Moui... ''De la démagogie en France''.
-C'est le titre de son nouveau bouquin ?
-Tout à fait.
-Je sais à qui vous pourriez prendre comme modèle à ce sujet...
-Hum, hum. Bon, on va y aller hein ! Tchao, hein, Sandie !
-Ouais, hein, on y va, 'faudra pas indisposer plus longtemps... Hum ?
-Aurevoir monsieur Etienne. Et... see you later Empereur !
-See you later !
Incroyable.
-Merde, j'pensais que tu t'y étais vraiment habitué !
'va me falloir encore un peu de temps, j'crois.
-Bah, ça viendra.
Mais dites moi, on est de retour dans la rue du canard là...
-Effectivement.
Ah. En fait, vous ne savez pas du tout où on doit aller, c'est ça ?
-Si, si ! Mais faut que je... rha, laisse moi tranquille !
Bon, ben, j'vais retirer de l'argent alors.
-Hein ?
Ben ouais, quitte à aller picoler, autant que je prenne du liquide.
-Ah, ce nouveau système là. Bon, alors, quelle banque ?
Comment ça ?
-T'en as deux au choix, qui se font face. CIC ou Caisse d'Epargne ?
Qu'est-ce que j'en ai à foutre !
-N'empêche, 'faut faire un choix.
Vous croyez que j'vais rester là pendant des heures à me demander laquelle je vais prendre ?
-'Ch'ais pas, à toi de voir. Moi, j'dirais...
Non, mais franchement !
-Quoi ? T'as déjà fait ton choix ?
Va pour le CIC.
-Attends un peu !
Mais quoi ?
-Sur quoi tu te bases pour retirer ton argent, là ?
Sur rien ! C'est tout, j'la sens bien !
-Alors là...
Quoi ?
-Etienne, tu viens de faire un choix irrationnel.
Oh, bordel, vous allez remettre ça !
-Et ce n'est que le premier !